Climat : cette décennie peut être incroyable

Clément Pairot
15 min readAug 10, 2021

Je suis profondément optimiste deux jours après la publication du sixième rapport du GIEC et ce malgré les blocages perceptibles à de nombreux niveaux. Conscient que cet état d’esprit est peu commun, je vous partage ici les éléments qui me permettent d’être si positif. Deux possibilités à la fin de ce texte : soit vous avez des arguments pour démonter mon optimisme, et je vous encourage à les partager car je ne souhaite pas vivre dans le déni ; soit vous aurez davantage d’éléments pour vous engager d’une manière efficace et concrète et ainsi éviter découragement, blocages et stupéfaction.

Au cas où vous manquez de temps, voilà les trois actions qui peuvent rendre la décennie de bascule écologique à venir enthousiasmante :

  • Participer à un atelier de la fresque du climat, se former à animer la fresque du climat, en animer un maximum, sans relâche, pareil pour l’atelier inventons nos vies bas carbone
  • Incarner dans son quotidien dès que possible l’indispensable décarbonation de l’économie
  • Systématiquement accompagner ce choix individuel d’une traduction politique, rendre visible en quoi il est davantage synonyme d’émancipation que de restriction, et se rappeler que si nous nous mobilisons l’écologie populaire peut gagner en 2022 quoiqu’en disent les sondages à 200 jours du scrutin.

Voilà, c’était mon “résumé aux décideurs” pour les gens pressés. J’espère que vous avez quand même davantage que 30 secondes à dédier à un sujet qui concerne la préservation de milliards de vies humaines au cours du siècle à venir.

J’ai de la chance, un de mes deux jobs me semble être le plus beau métier du monde. Je suis animateur de la Fresque du climat, un jeu pédagogique de 42 cartes qui vulgarise en 3h le rapport du GIEC pour n’importe quel public. Durant ce serious game, trois à vingt personnes reconstituent l’ensemble des liens logiques entre les phénomènes qui composent le réchauffement et le dérèglement climatique. Ensuite elles passent une heure à échanger pour commencer à tracer le chemin vers des actions concrètes et efficaces à la hauteur de l’enjeu. La “fresque” qui résulte de l’atelier est tangible et imagée. Elle fait enfin des liens clairs entre les émissions de gaz à effet de serre et les phénomènes climatiques extrêmes que l’on voit de plus en plus fréquemment (sécheresses, inondations, feux de forêts, canicules…). Parce que les participants reconstituent eux-mêmes les liens logiques, jouer à la Fresque crée un déclic inédit chez eux. Une fois la « fresque » constituée (les cartes sont alors disposées sur la table et reliées par des flèches de couleur), le groupe est souvent sidéré. En effet, le schéma est implacable : en utilisant des énergies fossiles pour ses activités diverses l’humanité dérègle le climat et amène à la multiplication de phénomènes extrêmes qui mettent en danger ses conditions de subsistances fondamentales de milliards d’individus à l’horizon d’une à deux générations. L’humanité est litéralement en train de flinguer l’humanité. Plus exactement, une part réduite de l’humanité, par le mode de vie qu’elle s’offre et le système économique qu’elle impose au reste du monde, est en train de flinguer l’humanité, mais j’y reviens dans quelques lignes.

Résultat d’un atelier de la Fresque du Climat

L’enjeu n’est donc pas de sauver la planète, elle n’a pas besoin de nous. Ni le climat, il a toujours existé. L’enjeu est de préserver au maximum sa relative stabilité, l’empêcher de franchir le seuil d’un dérèglement fatal. Mais fatal pour qui ? La vie sur Terre ? Elle s’est remise de cinq extinctions, elle se remettra de celle-ci. L’Homme ? Il y aura très probablement une poignée de milliardaires égotiques pour s’envoler ou se bunkeriser pour encore 150 ans. Non, ce qu’il s’agit de sauver, de préserver, ce sont les conditions d’habitabilité du plus grand nombre : l’accès à de l’eau douce potable, à de la nourriture suffisante, et à un espace de vie préservé des phénomènes extrêmes. Un autre élément peut être sauvé du même coup : notre dignité en tant qu’individu d’avoir agi pour être capable de soutenir le regard des individus qui nous demanderont dans 10 ou 20 ans « qu’avez-vous fait quand vous avez su ? »

Une fois cette prise de conscience ancrée, les participants et participantes enclenchent un débat ouvert pour discuter des choix à faire et des actions à mettre en œuvre au niveau des entreprises, des États et des comportements individuels. J’ai le sentiment de faire le plus beau métier du monde car j’accompagne au quotidien des individus à ouvrir les yeux sur un enjeu vital, à se sentir légitimes à agir dessus, et à commencer à contribuer une bascule inédite de nos sociétés humaines. À la fin d’une fresque, il est extrêmement rare que les « fresqué.e.s » ressortent défaitistes, accablés, déprimés. Le plus fréquemment, les sentiments qui traversent le groupe sont combativité, détermination, sens de l’urgence, envie d’agir. En tant qu’animateur, c’est une véritable victoire, à chaque fois, de réaliser que la pédagogie marche, que l’outil fonctionne, que l’enthousiasme que j’ai à le transmettre est communicatif. Que, oui, on peut faire confiance aux humains pour agir quand ils ont enfin intégré dans leurs tripes l’urgence d’un enjeu et que la nature humaine n’est pas vouée à détruire son écosystème dans l’indifférence et la lâcheté.

Avec la publication du sixième rapport du GIEC, le jeu de carte de la Fresque ne changera probablement qu’à la marge car, et c’est rassurant pour la robustesse du consensus scientifique, le sixième rapport n’apporte rien de radicalement nouveau. Ce qu’il constate aujourd’hui et prévoit pour les années à venir est juste pire que le scenario médian du dernier rapport. Par ailleurs, ce qui était probable est devenu très probable, ce qui était très probable est devenu sans équivoque. Néanmoins, le rapport est très clair : ce n’est pas parce que les projections de scénarios sont douloureuses qu’il faut se résigner à l’inaction. Ce rapport réaffirme avec une grande confiance l’existence d’une “relation directe entre les émissions cumulées de CO2 et le réchauffement climatique qu’elles causent”. Cette corrélation implique “qu’atteindre zéro émission nette de CO2 est une nécessité pour stabiliser la hausse de la température liée aux activités humaines.” Et que “limiter cette hausse à un seuil donné nécessite de rester en deçà d’un budget total d’émission carbone pour les années à venir.” « Chaque tonne de C02 compte. » Nous n’avons plus de temps à attendre pour enclencher la décarbonation accélérée de l’économie qui nous permettra de rester en-deçà du seuil de 1,5°C de réchauffement. Nous n’avons qu’une poignée d’année de marge de manoeuvre pour enclencher une décrue accélérée permettant d’éviter de franchir le seuil d’emballement climatique estimé à 2°C. Au-delà, la régulation se comptera entre autre en vies humaines en millions, jusqu’à ce que l’humanité décarbone ses activités ou tombe pour sa grande partie dans un état de survie peu enviable.

Face à ce constat implacable j’ai observé depuis hier trois types de réactions :

- Le déni. De la part du gouvernement d’Emmanuel Macron et des acteurs économiques qui prétendent œuvrer dans le bon sens alors que leur manque d’ambition et de réalisations concrètes fait qu’ils ne sont pas du tout à la hauteur de l’enjeu.

- La résignation. De la part de celles et ceux qui sont passés en quelques années de “non mais ce n’est pas si grave on va trouver une solution “ à “il n’y a rien à faire c’est trop tard, c’est foutu.” Je suspecte cette partie de l’humanité d’être aujourd’hui dans un réflexe paresseux face à l’action et de, pour le moment, manquer d’imagination, préférant trouver toutes les excuses pour surtout ne rien changer, aveuglées par ce qu’on définit comme “confort”. Alors qu’un monde enthousiasmant est à porté de main quand on se met à décarboner sa vie.

- L’accablement. Chez de nombreux militantes et militants qui se demandent comment nous pouvons faire pour inverser la tendance à temps.

Pour sortir de ces trois impasses, nous allons devoir concentrer nos efforts avec efficacité, car nous manquons de temps. En moyenne en France, nous devons diviser par deux nos émissions en dix ans, par six en vingt ans. Face à ce délai extrêmement court, nous devons trouver les outils qui vont nous permettre d’impliquer dans la bascule écologique en un temps très court près d’un milliard de personnes au niveau mondial. Plus exactement, d’acculer les pays, les industries et les communautés humaines qui rassemblent les 800 millions d’individus qui sont responsables de la majorité des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique. Oui, toute l’humanité est concernée par les conséquences du dérèglement climatique mais tout le monde n’y contribue pas de la même manière. Les études d’Oxfam illustrent que les 10% des humains les plus riches sont responsables de 50% des émissions de GES.

Notre défi est de leur faire prendre conscience du problème et leur rendre attirant un monde alternatif décarboné. Alors la bascule sera soudain bien plus simple à mener. Car les riches ont la triple “chance” :

  • d’avoir une grande marge de manœuvre dans la réduction de leurs émissions (beaucoup de leurs émissions ne sont pas liées à des besoin primaires ou contraints),
  • de pouvoir participer à réorienter l’économie par leur épargne en investissant massivement dans des activités décarbonées et significativement moins énergivores que celles actuelles,
  • de pouvoir réorienter les imaginaires collectifs des 7 autres milliards d’individus de la planète qui pour une part substantielle aspirent à leur ressembler.

Comment faire pour radicaliser sur la question du climat une part significative des 800 millions d’individus ? Cela passe par trois étapes : Transmettre, Incarner, Politiser.

Transmettre

Il est peut-être temps que je vous explique pourquoi j’ai l’impression d’avoir le plus beau métier du monde en tant qu’animateur de fresques du climat. Cet atelier est fascinant car il résout trois impensés qui nous ont fait prendre un retard terrible sur la question climatique depuis la création du GIEC en 1988 :

- Les changements nécessaires pour décarboner l’économie sont d’une telle ampleur qu’ils seront impossibles à mettre en place si seuls quelques décideurs ont compris la complexité de ce sujet scientifique qui serait présumé inaccessible au commun des mortels.

- Les individus ont besoin d’avoir pleinement intégré l’urgence climatique et les risques que fait peser un emballement à ce sujet pour souhaiter les changements structurels de mode de vie et de société nécessaires pour éviter l’emballement.

- Tous les modes de transmission d’information ne permettent pas d’intégrer les apprentissages de la même manière. Lire un article, regarder un reportage ou écouter une conférence est souvent moins transformant qu’une expérience de pédagogie active comme un atelier d’intelligence collective du type de la fresque du climat. Pour la faire courte, jouer à la fresque du climat a significativement plus d’impact sur les participants que de regarder “Une vérité qui dérange”…film dont l’auteur a été récompensé d’un Prix Nobel. Vous en doutez ? Vous avez raison, le doute scientifique c’est important. Alors essayez-donc !

Par ailleurs, cet atelier est enthousiasmant car conçu pour une propagation virale. Cédric Ringenbach, son auteur, l’a imaginé de manière à ce qu’après avoir joué une fois vous puissiez vous former en une séance à animer vous-même, et ainsi participer à la démultiplication de la prise de conscience. L’outil est si efficace qu’en trois ans il a touché 200 000 personnes et que son rythme naturel de croissance l’amène à toucher 5 fois plus de personnes chaque année en moyenne ! On peut donc raisonnablement viser un million de personnes sensibilisées d’ici février 2022. Si on arrive à passer d’un facteur 7 à un facteur 10, on atteindra 1 milliard de personnes en trois à quatre ans, à nous de cibler le milliard des plus riches.

Bref, la pédagogie climatique n’en est qu’à ses débuts, si elle a été si lente et inefficace depuis 30 ans c’est qu’elle n’avait pas encore les bons outils. Aujourd’hui la fresque du climat répond à ce manque et il s’agit de faire feu de tout bois pour accélérer sa propagation. Vous pouvez vous inscrire ici à un prochain atelier et là à une formation si vous y avez déjà joué. Ah, et surtout, un conseil, ne présumez jamais que vous en savez assez sur le climat. Vraiment. J’insiste. Vraiment. Même si ça fait 30 ans que vous êtes écolo. Surtout si ça fait 30 ans que vous êtes écolo et que vous avez continué à ponctuellement prendre l’avion durant ces 30 ans.

Incarner

Une fois qu’on a compris les mécanismes du climat, il s’agit de comprendre et d’intégrer les ordres de grandeurs. C’est-à-dire de prendre conscience de l’ampleur de la mutation à réaliser individuellement et collectivement pour réussir à atterrir dans un monde largement décarboné.

Pour cela plusieurs options possibles : commencer par faire son bilan carbone individuel, notamment avec l’outil de l’ADEME Nos Gestes Climat, puis réaliser tout ce qu’il va falloir changer individuellement et collectivement pour passer sous la cible des 1 à 2T de C02 par an et par personne à horizon 2040 (sources: CGDD, SNBC). Car, avec le climat, il ne suffit pas de faire mieux, il faut faire assez. Et comme on est des sacrés cancres (moyenne française 12 T C02/an/pers. Moyenne de 1% des français les plus riches : 56T CO2/an/pers), le « assez » est assez loin des quelques petits aménagements marginaux du quotidien (tri de déchets, éteindre la lumière) ou du geste ponctuel. Il ne s’agit plus de se gargariser des quelques gestes décarbonés que l’on fait, mais de traquer la moindre action qui émet plusieurs centaines de kilogramme de carbone et voir comment l’éviter, ou la remplacer. Il s’agit par ailleurs de rendre visible ce que l’on fait et pourquoi on le fait, non pour s’en vanter mais pour participer à acculturer autour de soi progressivement. Au restaurant, à la boulangerie, le plus souvent je ne perds plus de temps à chercher dans le menu ou la vitrine le plat végétarien, je demande directement : “qu’est ce que vous avez de végétarien ?”. C’est souvent l’occasion de faire de la pédagogie sur le végétarisme (oui, les poissons aussi sont des animaux), et toujours l’occasion de rendre visible une demande consommateur qui peut à terme faire évoluer les commerçants.

Je sens monter la petite musique du « quoi qu’on fasse, tout est écrit pour les 20 ou 40 prochaines années. », alors clarifions ce point. Premièrement ce n’est pas si basique que ça, et même si ça l’était ça ne change rien. Si on ne commence pas maintenant où sera-t-on dans 20 ans ? Gildas Véret, un ami permaculteur aime à répéter : “Le meilleur moment pour planter un arbre, c’était il y a 20 ans. le deuxième meilleur moment, c’est maintenant.” Et puis, c’est assez grotesque de repousser la mutation comme si on était déjà épuisé avant même d’avoir commencé la moindre action véritable. Car non, la transition énergétique n’a pas commencé, nous continuons à l’échelle mondiale à consommer chaque année plus d’énergies fossiles que l’année d’avant. Il est donc temps de se rappeler que l’inaction, le business as usual va mener à des centaines de millions de morts. Deux possibilités dans 30 ans si l’on a rien fait : ou bien vous êtes mort, ou bien vous devez vivre avec la culpabilité de la mort de millions d’individus du fait de nos inactions individuelles et collectives. La maison brûle mais c’est notre seule maison, alors que fait-on ? On la laisse brûler ? On continue à négocier sur qui doit porter les seaux d’eaux et à négocier sur la taille du seau sous prétexte que ce serait fatigant à porter ? Ou on fait comme dans tout incendie : on met toutes nos forces dans la bataille et on fait tout ce qui est en notre pouvoir pour l’éteindre ?

Il s’agit donc d’inventer et d’incarner des vies bas carbone. C’est ce que font les membres de l’association éponyme qui a développé un outil permettant de prendre la mesure carbone des différents modes de vies afin que chacun.e puisse réaliser l’impact de ses choix individuels autant que les mutations structurelles et politiques nécessaires à porter pour permettre une décarbonation de nos vies sans perdre en saveur. Ainsi, je n’ai jamais autant apprécié chaque minute des mes voyages depuis que j’ai arrêté l’avion. J’ai découvert un nombre de plats incroyables depuis que j’ai ajouté la contrainte “pas de viande” dans mon alimentation, etc. Le tout avec le plaisir que procure le fait de s’aligner, sans nier les imperfection du point d’étape où l’on se trouve. Encore une fois, tout ceci est un processus.

Car soyez prêt.e.s, la bascule va être géniale. Oui il y aura des deuils à faire. Loin de moi l’idée de nier cela. Mais cette bascule écologique peut être à l’origine d’une émancipation fabuleuse, d’une libération de l’imagination inédite. Il ne s’agit pas tant d’arrêter la viande que de réinventer notre gastronomie. Il ne s’agit pas tant d’arrêter l’avion et la voiture que de redécouvrir le véritable voyage (en opposition au tourisme) et la mobilité. Il ne s’agit pas tant d’arrêt le neuf que de redécouvrir la valeur de chaque objet, et la satisfaction de savoir réparer ceux qu’on utilise. Il ne s’agit pas tant de s’éclairer à la bougie et d’avoir froid tout l’hiver mais de reconquérir son habitat en l’isolant et en optimisant ses circulations d’énergies. Surtout. Surtout. Il s’agit de réaliser que, l’économie de marché étant fondamentalement carbonée aujourd’hui, décarboner c’est souvent sortir du marché, et que l’argent gagné en moins c’est du temps libéré en plus. Il s’agit de changer de focale. Il s’agit de réaliser que le capitalisme extractiviste et croissanciste n’est pas l’unique système économique possible, qu’il ne constitue pas un aboutissement ultime et qu’il est probable qu’on trouve dans les années à venir d’autres modes d’organisation des échanges qui soient plus respectueux du vivant. L’échec du communisme croissanciste d’Etat ne prouve en rien l’impossible dépassement du capitalisme actuel.

Dernière précision. Etant donné qu’il ne nous reste qu’une poignée d’années il va falloir faire sans la béquille technologique pour le gros de la décarbonation. Les personnes qui disent « il n’y a pas de solutions » se trompent. Il n’y a pas de solution principalement technologique pour décarboner l’économie, ça oui. Des solutions sociales, politiques, économiques, il y en a, c’est une certitude. C’est juste qu’elles sont bien plus innovantes que l’économie extractiviste et croissanciste que l’on nous impose depuis trois siècles. Testons la frugalité dans nos vies, démontrons que c’est souhaitable, redécouvrons les vertues de l’accueil, du partage, de la communion avec le reste du vivant via la permaculture, de la libération de la propriété privée systématique, et convainquons le plus grand nombre de faire de même.

Politiser

Tout est politique mais tout n’est pas entre les mains DES politiques. Une grande part de la politisation de la mise en cohérence écologique individuel va tenir dans la manière de le présenter, quelques soit l’état de la vie politique de votre territoire ou de votre pays. Pour cela il est important de prendre conscience et de faire prendre conscience aux gens qui nous observent faire (nos proches, mais aussi la foule de commentateurs formidables que les réseaux sociaux a créée) que l’on ne décarbone pas son mode de vie pour être parfait mais pour :

  • se préparer au risque de transition,
  • expérimenter tant qu’on a encore un peu de marges de manoeuvre,
  • faire des erreurs, pouvoir y aller par étapes (mais rapidement alors !) tant qu’on n’est pas encore plus contraint,
  • se rendre compte que c’est faisable,
  • se montrer et démontrer aux autres que c’est désirable.
  • Et, envoyer un signal aux responsables politiques que certains citoyens et citoyennes et véritablement prêts à les suivre s’ils prennent des décisions audacieuses. Oui, car, vous savez, le « je suis ultra chaud pour qu’on interdise l’avion mais tant que c’est autorisé je ne suis pas prêt à l’arrêter » ne convaincra aucun politique d’être ambitieux sur le sujet.

Une autre urgence qui permettra de bien politiser et donc de créer du lien, plutôt que de viser la perfection individuelle et de veiller à toujours être accessible : accepter de dire haut et fort que l’on s’est trompé, que l’on a eu tort, que l’on a été durant une poignée d’années (ou de décennies suivant notre âge) des aveugles volontaires sur l’impact de nos modes de vies. Que pour certains nous avons voté Macron alors qu’il n’avait pas le début d’un programme sur le climat. Tant que vous promettez de ne pas le refaire c’est le principal. Personnellement, j’ai mangé de la viande régulièrement jusqu’en 2016. J’ai pris l’avion abondamment jusqu’en 2017, j’ai acheté chez Zara jusqu’en 2018. Je continue à céder une fois par trimestre à une rondelle de saucisson. J’utilise des objets technologiques même si je fais de mon mieux pour les prolonger le plus possible.

Dans tous les cas, politiser veut dire également peser dès que c’est possible dans le champs électoral. Parce que les élections sont des moments d’accélération de la prise de conscience de l’opinion et des accélérateurs de mobilisation des personnes déjà convaincues. C’est pourquoi, il est par exemple totalement paradoxal de trouver qu’il est urgent d’agir sur la question climatique et de se résigner à la défaite des idées écologistes à la présidentielle 2022 du fait de la division et la faiblesse actuellement de ce champs politique. Il nous reste 200 jours pour changer cela. Tout comme il nous reste 5 à 10 ans pour amener les 800 millions de sur-emetteurs carbones à adopter un mode de vie sobre. Et nous allons le faire. Ça s’appelle la primaire populaire. Mais j’ai beaucoup écrit alors je conclus avec une vidéo.

Je te prie de croire que tout ce billet n’était pas un simple exercice de style voué à terminer en propagande pour la primaire populaire et que je l’aurais écrit même si je n’avais pas été impliqué dans ce mouvement. Mais il se trouve que je suis convaincu de la pertinence de ce mouvement politique et par le processus qu’il propose. D’ailleurs depuis peu mon deuxième job est justement aussi mon job de rêve puisque j’aide à structurer la mobilisation de ce mouvement pour qu’on arrive à faire gagner l’écologie populaire en 2022. Alors je me devais de conclure là-dessus.

Clément Pairot

--

--

Clément Pairot

Animateur et formateur de la Fresque du Climat, consultant en bifurcation écologique. Formateur en mobilisation citoyenne.